Minotaure, copie d’une statue de Myron, Musée National d’Archéologie d’Athènes
« Un seul mot portera la réplique et le coup de grâce. »
(Jacques Dupin)
vase grec, fin du Vème siècle avant J.C
« Le croiras-tu, Ariane? dit Thésée, le Minotaure s’est à peine défendu. »
(Jorge Luis Borges)
Séparation dont l’instant prend la mesure, qui l’ébranle, la dénude, la veille, l’ampute, la porte au rivage où la lumière chute, l’adosse à l’exil où tout se tisse et se tient…
Essaim comme pétrifié, chant comble, parole truquée, lestée de qui l’évince, timbre, ornière, rouage que souffle taillade, que besoin étrangle, lente autopsie des traques ne trompant plus ce qu’elles font être…
Consentir au Retour, alors, avant que le mentir ne s’en empare et l’habite, sourd passeur ne reculant que pour en mesurer le chancelant cortège, en usurper les glus et les failles…
Piétinements mats, étables borgnes, ordres murmurés, plaies de trop, gestes somnambules épuisant les yeux entravés, butin forgé d’éclipses, de multiples, de reliquats, pas qui divergent, mots vacillants sur quoi l’on bute, par quoi l’on intercède, entre deux gorgées d’aqua-tofana, comparses du faire et du revoir coulant et se perdant derrière, au midi des voeux, aux flancs de la lèpre, tout à la jouissance de n’avoir jamais été l’Autre, à la blessure de grandir, à l’obscure joie de s’en aller…
Fiers que l’on sache: nulle parousie écourtant l’envol, nulle chasse cachant ses preuves à qui passe, puise et clôt, les raffineurs de poisons, les pourvoyeurs d’évidences…
Mais où est le maintenant qui n’est pas d’ici,
Le temps un et innombrable,
La paix qu’amont précède, mais n’en surgit d’aucun,
La circulaire solitude où j’exulte…
Étouffe ces bonds perméables à ta vaillance: dévoilés, comment pourraient-ils ne pas nous décevoir?
Persévérence de l’engendré, enclos de nos jeux, prés de nos fêtes…
Tout ce que tu appris en lisant, en souffrant, en vivant, eaux de l’enceinte vigilante, verbe qui cèle, mesure qui respire…
Rien ne bougeait, chant de grillons, bourdonnement de guêpes énervées de chaleur, de lumière crue, cris des oiseaux, rivés à cela qui tout sait de ce qui fut…
Tu t’ouvres, oui, au seul épars qui exige des conspirateurs à dénouer…
Mise à distance, geste immolé aux replis qu’on recompte, arc à vif éboulé dans le temps buissonnier…
Quelle est-elle, la chose dont l’effacement est la seule certitude, qui en appelle à qui ne se laisse pas enfermer en elle-même?
Bouts de mur, chimères huilées, puissance sans nom, sans cri, qui ne se peut, ni oublier, ni assouvir…
Que ne donnerais-je pour la mémoire
Du portail du pavillon secret
Que mon grand-père poussait certains soirs
Avant de s’égarer dans le sommeil
plus vaste que la musique
N’adhère qu’au terme ajourné où tout sera silence, jamais aux anesthésies qui dévaluent!
Paroles de profil, ombres à dire, paupières dévêtues livrant passage aux traces détournées, aux levains…
Que vaut, en face, la fragile insinuation de cette cohérence dont nous nous croyions, altièrement, revêtus?
Héritière des trépas, fluide merveille qui ne traque, n’efface, n’attend…
Herbes cassantes, transies, bouclant le cercle à l’ombre duquel l’on s’effrite…
« Dans cet exode où tant de paroles ont douté, où tant de poings ne heurtent que l’enclos de jardins fuyants, je suis à tes côtés. Je te donne la force d’entrer dans ta ville et l’orgueil de n’y point régner. »
(Jacques Dupin)
porte mangée 33 (photo de Maryse Hache)
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