Je sais comment c’est: ni bruits, ni vestiges, que les bols vides, voeux rendus à qui accueille, imprègne…
Comment ne t’aurais-je pas reconnue, toi qui m’enfantes jusqu’au dernier gibet, cadence criblée, clôture renouée, ma toute lente…
(1982)
Presteza de intuição, raio imune por essência e não contingência, ímpeto da asa apagando o desalento, fluidas vozes, radiantes, obscuras, enfim confundidas ao ponto de abolir toda possível separação…
Se a poesia fosse um luxo, talvez nunca a teríamos encontrado; mas ela é tudo salvo isso, nunca tão asperamente necessária do que nesse inicio de século, onde de toda parte investe-se no desumano, onde a integridade mesmo do ser encontra-se ameaçada, agredida de fora e minada de dentro…Ela sim, e ela só, humilde e altiva, rugosa e sutil, cumpre o dever e tem o poder de libertar o segmento de altitude em nós contido e retido, durante aqueles poucos soberbos instantes pelos quais não há limite nem medida e que fazem de cada um de nos mais, muito mais do que a soma das suas pobres partes…
( » A poesia, porquê? », texte écrit directement en portugais – São Luis, 2000)
Folie carnavalesque dans la bonne ville de Recife, capitale du Pernambouc (premier jour)
Oh, comme tout cela semble à un million d’années-lumière, dans le temps comme dans l’espace…(cours sur Hobsbawm, Instituto Rio Branco, Brasilia, octobre 2008)
Quanta saudade! (Brasilia, 2008)
Le São Luis de Nauro, où je passai, parfois en sa compagnie, quelques-unes des années les plus pleines de ma vie..
RIDEAU
Accomplie soit la vie du poète qui,
dépourvu de clefs, toujours trouve
la porte close, ou ne la trouve même pas –
et rentre les yeux morts par l’autre route
des choses rendues au désespoir des formes.
(Nauro MACHADO: Cortina, dans « A antibiótica nomenclatura do inferno » – traduction: André Rougier)
Le « vrai » Carnaval, Olinda, Pernambouc
J’ai toujours vécu l’approche du Carnaval (la nuit, l’excès, les corps qui se pressent et exultent, la profusion d’excitants et libations, le désir de mouvement – sans fin, le mouvement du désir – sans frein) comme, entre mille autres, une oblique mais point perverse manière de faire un p’tit clin d’oeil à Eurydice…
(fin février 2011)
« Crois en toi, mais ne doute pas toujours des autres. »
( Machado de Assis)
Guère facile, facile, mais on ne désespère pas d’y arriver un jour…
« La maison au bord de la rivière » que les hommes du clan – dont je suis – ont, avec mon appui, bénédiction et pleine participation (bien que souvent à distance), fait construire loin de la « casa grande » pour abriter nos festins et libations en compagnie de celles des nos femmes que ne rebutent pas la viande grillée au charbon de bois, la bière à flots et les blagues pas toujours d’une subtile et sulpicienne élégance…(et puis il suffit de quelques marches à descendre pour se rafraîchir les idées, et pas seulement elles…)
(décembre 2011)
Encore une, et le monde tourne plus rond…
Le départ vers Amérique du Sud, c’est pour demain. M’accompagneront sur les terres de Machado de Assis et de Borges le “Journal d’un lecteur” d’Alberto Manguel, “L’oeil et l’esprit” de Merleau-Ponty, “Portraits de femmes” de Pietro Citati, “Passions impunies” de George Steiner, “L’autre voix (poésie et fin de siècle)” d’Octavio Paz, “Stanze” de Giorgio Agamben et le”Journal d’une saison sans mémoire” de Silvia Baron Supervielle (j’espère, bien qu’ayant droit avec la “TAM” à 51 kg, m’en tenir là, mais me connaissant un peu…)
Avenida Paulista, São Paulo, SP
Je penserai beaucoup à vous tous, visages connus ou inconnus, proches ou lointains, mais à coup sûr réelles présences qui me font, depuis un bout de temps déjà ou tout récemment, l’amitié d’accompagner le (dernier) segment d’un trajet qui ne fut ce qu’il fut que pour m’aider à (mieux) devenir, comme nous tous, ce que de tout temps j’étais…
(janvier 2012)
Aéroport « Charles de Gaulle » – Terminal 1, Paris (France)
Entre le moment où j’ai quitté mon appartement montmartrois et celui où j’ai franchi le seuil de celui de Brasilia, vingt-six heures se sont écoulées, un « no man’s land » à nul autre pareil, sans poids, sans consistance, flottant, impérieux et fugace à la fois, fait d’aéroports, d’interminables queues, contrôles, commandements, envols, repas innommables, bouts de sommeil, correspondances, échanges avec les voisins de siège à propos de tout, de rien et même de l’essentiel, comme souvent entre des gens qui savent qu’ils ne se reverront plus…
Aeroporto Internacional « Antonio Carlos Jobim », Rio de Janeiro – RJ (Brésil)
Puis ce fut l’arrivée, et le sentiment, enfin – dans la voiture qui me ramenait, sous un ciel changeant valant mieux que les 26 degrés qui m’accueillirent, vers mon deuxième « chez moi » – d’une étrangeté renouvellée qui tout effaçait, d’une réconfortante distance qui était loin de n’être que géographique…
(janvier 2012)
Aeroporto Internacional « Juscelino Kubitschek », Brasilia
« Retiré dans la paix de ces déserts,
avec peu de livres, mais tous doctes,
je vis en conversation avec nos pères,
j’écoute de mes yeux les morts. »
(Quevedo)
Lui l’écrivit dans un petit village de la Sierra Morena, je le transcris (et le vis) dans une « fazenda » perdue dans l’immensité du Planalto Central brésilien, plus que jamais certain que le temps est bel et bien une illusion…
(février 2012)
Cabane de vacher, chácara Sabino, Goiás, Brésil
L’adieu (tout provisoire) à l’une de « mes » cabanes…
…mas pas à ce qui s’y passait!
En 1971, j’ai perdu la foi en l’amour (« elle » n’avait rien à y voir, tout fut de ma faute: idéalisation excessive d’une amourette d’étudiants et, surtout de son sujet/objet – conséquence: presque 15 ans de totale séparation du sexuel et de l’affectif). En 1973, j’ai perdu la foi en la révolution, peu après ce psychodrame que fut pour beaucoup l’enterrement de Pierrot Overney (conséquence: glissement – qui a duré 10 ans – vers un cynisme désespéré pour tout ce qui avait trait à l’idéologie et à la politique). En 1977, j’ai perdu la foi en l’écriture (conséquence: 20 ans sans écrire une ligne appartenant à ce qu’on appellerait, en simplifiant, « littérature »). En 1978, j’étais « officiellement » alcoolique. C’est le Brésil (que je fréquentais, tout comme ses ressortissants, depuis 1972) qui m’a aidé à me « reconstruire » petit à petit, sur les trois plans: non pas en apportant des réponses aux questions que je me posais, mais en m’aidant à ne PLUS me les poser, ou à m’en poser d’autres. Ce fut long, parfois difficile, mais j’y suis arrivé, cela fait un bon bout de temps déjà (rappel n’a absolument RIEN à voir avec une quelconque bouffée de « bisounoursite », ce qu’on aurait légitimement pu penser compte tenu de l’heure choisie d’en parler, mais si quelqu’un parmi mes lecteurs-trices avait besoin, peu ou prou, sur ces thèmes ou sur d’autres, d’une bonne bouffée d’oxygène, qu’il sache que sa rencontre avec ces lignes ne fut peut-être pas si fortuite que cela…)
(août 2012)
Soixante – cinq mois s’y passèrent (parmi les plus pleins et heureux) de ma vie…(Lago Norte, Brasilia, DF, Brésil – de juillet 2003 à décembre 2008)
« Le simple, que l’ambition n’étouffe pas, prend tout son temps pour voir le monde, l’entendre, le toucher. Rester assis deux heures sans bouger presque ne lui fait pas peur. Si on lui demande pourquoi il gaspille sa vie comme ça, à ne rien faire, il répond: « Et comment que je suis en train d’en faire, des choses! Je suis en train de penser«
( Clarice Lispector – traduction André Rougier)
« Un livre, parfois, toujours, est plus grand que nous. »
(João Guimarães Rosa)
Comme il a raison, l’auteur de l’immense « Diadorim », universel PARCE QUE pleinement brésilien! (précision guère inutile en ces temps minables que sont les nôtres…)
« Grands », nous ne saurions l’être, nous autres, qu’à l’aune des livres que nous n’avons pas osé écrire, et encore…
Loin du tumulte, j’ai vu le jour se dessaisir de sa lumière derrière les arbres, le ciel reprendre son noir velouté, exhiber les étranges constellations de l’hémisphère qui ne me vit pas naître, assis pas loin de ma cabane sur l’un de ces rochers tombés là on ne sait comment, vestiges de volcans plus vieux que ceux d’Auvergne, « meeting in distant summer the painless step, the long ago broken symmetry… »
“Ser poeta é duro e dura
e consome toda
uma existência.”
« Être poète, c’est dur, et dure,
brûle et avale toute
l’existence. »
(Nauro MACHADO – traduction: André Rougier)
C’est, si je puis dire, aussi « simple » que ça…
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