
Écrit en marge du fort bel article de Claro, que voici, que voilà:
http://towardgrace.blogspot.fr/2015/09/rentree-litteraire-suprematie-de-la.html#comment-form

J’avoue que le début de l’article m’a quelque peu déconcerté, voire inquiété. Vite rassuré dès le milieu, et tout à fait par la fin, je me suis posé les mêmes questions et abouti à la conclusion (laquelle intéresse sans doute peu de monde, mais allons-y quand même!) que moi qui vous cause, c’est surtout l’immobilité que j’aime. Le mouvement aussi, faut pas croire, mais à condition qu’il ne « déplace pas les lignes », comme le disait si bien en son temps Charly de Paris (qui n’en loupait pas une, le pauvre: réac, dandy, alcoolo, miché, syphilitique,et j’en passe) En fait, c’est même pas qu’il les déplace, ce satané mouvement, qui me met parfois en rogne, c’est qu’il le fait plus qu’à son tour dans le mauvais sens, y’a qu’à voir – en nous limitant au domaine « poétique » – les productions dont nous ont gratifié (« mais non, Simone, je l’ai pas dit!! »)
Mais je crois, tout comme toi, à la secrète copulation de l’agitation et du temps, de l’immobile et du mouvant, à qui il arrive parfois d’aller dans la bonne direction s’agissant de poésie, c’est Pessoa qui l’affirme, et je n’ai aucune raison de ne pas le croire, au bout d’un certain temps même des petits comme moi finissent par s’en apercevoir: « Feindre est le propre du poète / Il feint si complètement / qu’il en arrive à feindre qu’est douleur / la douleur qu’il ressent vraiment » (pour ceux que ça intéresserait, c’est dans « Cancioneiro »)
Et puisque j’évoquais l’albatros de la rue Hautefeuille, vous aurez remarqué que manque, dans la longue liste de ses « forfaits », le drogué qu’il fut également – inadmissible oubli ne s’expliquant que par mon aversion envers les substances illicites, car le paradis, pour peu qu’il existe, ne saurait être que pur artifice, alors que l’enfer qui nous entoure, partout et de toujours présent, est, lui, des plus naturels, défi et miroir à la fois. Chose que tout écrivain digne de ce nom (de ceux pour qui la littérature n’est pas invention à peine, ou alors jeu, expérience, boulier, forge, mise en joue ou sur le métier, mais création pour de vrai, faisant concurrence à ce qui EST au nom de l’inconcevable, irrévocable devenir) sait ou, à tout le moins, pressent ou devine (« en tout cas, rien des apparences actuelles », ce devenir que n’eut de cesse d’évoquer le gars Arthur, lui qui, s’agissant de drogue, d’enfer et de littérature, en connaissait un rayon, et même les trois, si je puis dire) Heureux ceux dont le domaine de prédilection est le roman, la nouvelle, le récit, l’essai ou le théâtre, eux purent continuer après lui, alors que pour ceux qui font (ou croient faire) dans la poésie, c’est une toute autre histoire – TOUTE l’histoire, si c’est bien de littérature qu’il s’agit, et non de ses restes. Car ne subsista pour eux que le choix entre tenter de le nier (certains s’y escrimèrent avec un certain succès, mais nous savons bien qu’il n’en aurait cure) ou de le dépasser (chose impossible, car comment mieux couvrir une étendue qui, « littéralement et dans tous les sens », ne le fut que par lui, et une poignée d’autres.) Loin du questionnement de l’immobile et du mouvant dans l’écriture? Que nenni, en plein dedans, au coeur même de la cible!

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