En parlant du « Bavard », Gilles Quinsat nous faisait à juste titre remarquer (dans « Écrit en marge ») que « sans doute, la parole du bavard nous tient en respect, elle est bel et bien l’instrument susceptible de maintenir entre le narrateur et nous la plus ferme distance: celle-là seule qui lui permet de se faire entendre. »
Distance que le silence du bavard, le seul qui soit, vient parfaire, assouvir, ratifier: apprentissage hanté, singulier, mise en joue ou en abymes, double des jeux de par lesquels la voix qui assaille vient éprouver la vaillance de l’écoute, en décontamine l’issue, pille ses entraves, se fait pont qu’à notre insu l’on traverse, soumis aux mots plus qu’aux actes, complices de la durée, pas de l’instant. Avec des Forêts, ce sont nos yeux qui regardent, mais c’est la langue qui voit: tantôt le beau fardeau qui fait tenir debout, tantôt l’imprécise machinerie du guet où l’on se dépossède avant de se rejoindre…
Un, grand, un très grand livre d’un jeune homme de 26 ans! (tiens, ça nous change de…dites-vous bien que seule ma proverbiale mansuétude m’empêche de citer quelques titres de romans bien en vue – mais à jamais hors de la mienne!
Je suis, résolument et sans états d’âme, en faveur d’une littérature à deux vitesse: l’une, speed, avec des personnages speed, produite par des auteurs speed à l’intention de lecteurs speed, l’autre bien plus « pépère » et dont je me voudrais, avec et tout comme quelque autres, le modeste, fidèle et enthousiaste paladin (lenteur ne voulant surtout pas dire manque d’ardeur ou piètre valeur, vous savez…)
Puisque soleil et chaleur ont l’air de revenir (bien qu’à tout petits pas), ne loupez surtout pas « Des roses rouges vif », l’excellent roman de la jeune auteure brésilienne Adriana Lisboa, paru en 2009 chez Métailié dans une remarquable traduction de Béatrice de Chavagnac – livre grave, raffiné, peuplé de fantômes, bâti autour de l’histoire d’un secret, où la violence sourde, murmurée, du non-dit et de l’ajournement, des temps entrelacés et des jeux de piste nous saisit pour ne plus nous lâcher…
P.S: Et si vous avez l’heur de la rencontrer un jour (ce fut mon cas), vous verrez à quel point elle ressemble à son livre, y compris par la beauté…
Cholodenko, un roi des fées (mais tu vas nous sortir toute ta bibliothèque ?).
Non, même pas tous les livres que j’aime ou que j’ai aimés (sur le nombre de ceux que j’ai lu au cours d’une – déjà longue – vie, il y en a quand même un paquet) J’espère que tu ne trouves pas ça trop fastidieux, enfin, si ça l’est, tu peux « zapper », tu sais…lool