À Clarice Lispector, à Alejandra Pizarnik, à Roberto Bolaño, à René Char, à Antonio Tabucchi, qui m’ont, chacun à sa façon, appris ou réappris à dire « non »
Du sceau ou de l’énigme pas un signe, une allusion, une figure, un chiffre, mais ce qui fut et que rien ne remplace, l’instant où il n’y a plus de sursis, où les comptes s’épuisent…
Vienne l’heure où s’abolit ce qu’on vint revoir, le coeur de l’église, le tilleul sur la place, enchâssé dans l’été sans fin, le jardin brûlé par le soleil, la suie du pavillon, la mousse des sentiers, le silence… C’est ta vérité, mais elle ne leur est guère fidèle, tout ce qu’ils brodèrent sur ce que tu es seul à connaître ne sert qu’à toi…
Temps inaccompli, sauf en cette friche des feux que seul tu virais et qui, mordant, te soumet aux vraies soifs, sans miroitements, sans prophéties…
Brèche ouverte dans tes remparts, devinant et colmatant celles de l’oubli, elle qu’on ne parachève qu’une fois, poreuse aux complots, précieusement précaire, scellant les confins que tu guettas, pétrifiés en une seule béatitude…
Foyer peu à peu éclairant l’être, ce tout que tu ne puis fragmenter, dont chaque partie est sur l’heure et à jamais toi-même, te blesse et t’engendre comme telle…
Qu’approche l’oiseau lesté de la boue de nos fautes, forgeant des météores la saisie, vicariat de l’obscur déniant tes crues, tarissant l’obédience…
Guets, boucliers, ordalies, humectant les lèvres de qui ne reconnaît même plus l’ombre qui le tente – « bien » ou « mal » ne daignant s’exhiber que lorsque ce sont eux qui nous choisissent…
Ce n’est qu’ainsi que je te veux, dépouillée du sang sombre, du tourbillon des raisons, du galop du grand bai piétinant les paumes ouvertes où l’on saura tout démêler, du poison l’antidote, des tentations le repentir, des fins l’origine…
Te laisser habiter par ce regard comme malgré toi, non à peine voilant, mais clamant qui en ce temps relève déjà de ses défaites, ressaisi pour toi seul et ton tourment, à l’heure embaumée sous les traits de qui tu fus, sans les aveux, les embellissements.…
(1997)
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