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Archive for octobre 2022

ecr 1

Le tranchant sans quand , ni comment – la ruelle où tout se brouille et se perd – les mains tendues vers le fleuve rejoint là-bas, plus loin encore – les pieux plantés en aveugle, loin de nos coeurs – les années perdues à payer les dettes de l’Autre, qu’en ferons-nous?

Telle est la mémoire où les égouts hébétés n’ont pas leur place, ni ce qui choisit, nomme et sépare, ni la boue dispersée, les témoins égarés, le lointain sans partage, le chant qui nous en revint ou s’y voue.

Nous étions tous ensemble en ces temps rompus, fidèles à ce qui n’est plus, aux répits des saisons, à l’étendard  qui égare,  aux assassins que nos scrupules aiguisent – quoi d’autre?

Pas de réponse, rien qui distingue, rien qui divise, seul le dessous des choses, le sel sournois, le poids des regains et des litiges, ce qui trébuche ou déferle, mûrit en nous, change de couleur, efface la sentence crue, parachève la dernière embuscade.

  (octobre 2022)

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pt9

Oublions d’emblée les faiseurs, les truqueurs, les besogneux frappant à toutes les portes, les diseurs de bonne aventure, les éveillés aveugles / les tueurs de grands mots oublieux de tout, ceux qui éructent, désossent et désavouent, farfouillent parmi les tics, les leurres et les déroutes, mutilent et gaspillent, encagent la durée, hantent confusément les passages, font les fiers nous abreuvant de leurs postures, de leurs brouillons, bouillies et griffonnages / les éreinteurs de la lettre se tenant au chevet du doute, troupeau s’en allant joyeux vers la chute où tout est fausse écoute qui s’attarde, heure s’écoulant sans rien alléger, illusion grosse du vacarme se rêvant affranchi de la langue, oubliant que cela ne se peut ni en arrière de nous, ni devant, ni jamais.

Quittons-les au profit du tribut endigué disant de son ombre juste ce qu’il faut pour qu’on l’oublie, au profit des sources, des fables et des intrigues, au profit du singulier et du divers qui rien ne révèlent, disposant de nous sans à rien consentir, au profit des couvées par où le jour advient, au profit de l’explosion des temps, pas dans le temps, au profit de l’abandon qui porte le fer dans la chair de la langue, la déchirant et répétant jusqu’à l’épuisement, au profit de l’adieu toujours en réserve, au profit de la mort dépouillée de tout lieu, dénouée de tout présent, au profit du dérèglement à éparpiller que le Réel exige pour nous en défaire.

Nous ne disons pas « tout est fictif  » au sens où la littérature serait la vie, nous disons « la vie est quelque part littérature » parce que sans désemparer inventée, tenue et tentée par l’irréalité et la non-adhérence, lesquelles n’empêchent ni ne brident en rien le faire, mais le relativisent comme si tous l’on était, tant que nous sommes, éloignés en toutes directions mais jamais séparés, à la fois spectateurs et juges de nos actes, par eux accrus et abrégés.

  (octobre 2022)

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p5

L’heure est venue de prendre les devants, presser le pas, se remettre à vivre. Ce qui est fait est fait. Devant rien d’autre que le bref apprêt, la forge embarrassée, la rumeur amincie, la couche partagée au-delà des choix, l’intrigue soupesée et ses mensonges, les babils froissés en ligne de mire, les repentirs frôlés où s’effondrent les dernières armes, les marionnettes se serrant les coudes, les fouilleurs de souvenirs jouissant des gâchis de la lettre – poupées gigognes que l’on imagine, Hécates dévorant leurs prières improbables. 

Plus rien à louer sinon le sol trouble, la route qu’éblouit le défilé des spectres, l’alphabet et ses fatras, la phrase longue en bouche, puis ce retard, noir dans le noir, rage engourdie que dissipe le rauque matin des fleuves.                                                                                                                     

(octobre 2022) 

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tant qu'à vivre 1

Corps indifférents, périmés, génériques de fin livré aux bredouillages, aux salissures, aux gaspillages / parois d’une seule couleur, ombres portées, dépotoirs hors monde / clapotis sans traces, moiteurs où l’on peut tout se permettre / glaces sans tain où tout est double, insaisissable, maladroit / entrailles rétrécies, noms qu’on broie, paumes vouées aux apparences / tertres, trognons, pierrailles, molosses posant pour la postérité / mêmes yeux clos pour tout voir, même haut-le-coeur, même langue qui sans bouger recèle l’univers, ses passages défroqués, ses chants et ses foirades, le plaisir qui ne peut que ce qu’il peut, les lignes de la main fuyant nos voeux, le geste à gravir sans oublier la moindre note, les preuves dont on n’attend plus rien, l’itinéraire emprunté pour retomber en enfer, le ravin où l’on dit que tout recommence.

Le fracas à venir sera-t-il métaphorique, métaphysique, météorologique? Nous on l’ignore, seul le sait l’enfant aveugle dansant devant la faux, le dehors de profil où tout se paye, jusqu’au dégoût d’écrire qui n’empêche plus rien.

Vieillir, c’est aussi ne plus chercher sa place ou s’en affranchir, enfant juché sur les épaules du Temps qui s’en débarrassera une nuit dans un éclat de rire qu’il sera seul à entendre.

  (octobre 2022)     

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