On peut décider d’essayer, ou alors fuir, se cacher dans l’amnésie opportune, s’éloigner de soi comme de la peste de part en part traversée qui t’accompagne et te rappelle ici, en ce lieu, à cette heure où se tient au premier rang la louange inutile. Tu ne sauras qu’alors débusquer la réalité toujours plus pauvre que ce qu’elle cache, te débarrasser de l’ortie paresseuse venue sans nom à ta rencontre, des copistes dans le froid du soir piétinant les derniers pavés, de l’air cousu au-dessus des marais, de l’araignée happée par la paille radoucie, les réveils et les sermons, leurs parures d’algue et de rouille.
Archive for novembre 2022
JOURNAL D’UN AFFRANCHI (CCCCCCCXIII): L’homme invisible
Posted in élucubrations on 30 novembre 2022| Leave a Comment »
JOURNAL D’UN AFFRANCHI (CCCCCCCXII): Koan
Posted in élucubrations, journal de bord on 29 novembre 2022| Leave a Comment »
Où courent-ils tous, vers quel désert, quel abandon? Serait-ce vers le pays des eaux qui nient et noient?
Trop tard: la guerre est déjà là, les têtes sur le billot, la mort partout, le dernier escalier mène tout droit en l’enfer où tout s’écoule et s’écroule: les enfilades indifférentes, le défilé des fantômes qu’elles apprivoisent, les issues s’écartant à jamais de nos mondes.
L’aube est sans gouvernail, l’amour en vain réinventé. « Arrivée de toujours qui t’en iras partout », ourlet défait, robe tombée à tes pieds annonçant les jeux à venir, bons bras joints à la bonne heure, que faire de toi désormais?
JOURNAL D’UN AFFRANCHI (CCCCCCCXI): L’œcuménisme est toujours de mise, mais pas les ambiguïtés…
Posted in élucubrations, journal de bord on 27 novembre 2022| 1 Comment »
« Finir est souvent plus difficile que commencer », superbe phrase extraite de la lettre que le pistolero d’élite, héros vieillissant d’un Ouest lointain en passe de cesser de l’être, adressa au jeune et cynique ami (tireur émérite lui aussi, mais juste pour faire le spectacle, marque de fabrique de ces incompréhensibles « temps nouveaux ») qui l’avait « exfiltré » à Londres pour que la légende se perpétue en se muant en quoi elle se devra désormais se contenter d’être – une légende, précisément, rien d’autre.
Rien que pour encore et toujours la lire, cette phrase, je revois autant de fois que faire se peut ce grand film qu’est « Mon nom est Personne », tant j’aurais voulu avoir eu l’idée et le talent de moi-même l’écrire dans l’une des lettres adressées à mes jeunes ami(e)s autrices et auteurs car, en remplaçant « Far West » par « domaine de la poésie », je suis dans les mêmes dispositions d’esprit que le personnage incarné par Henry Fonda, sauf que sans échappatoire aucune, contraint donc de coexister avec ce large segment de l’extrême contemporain en poésie figurant, en ce qui me concerne, le degré zéro du « plaisir du texte »…
JOURNAL D’UN AFFRANCHI (CCCCCCCX): Les essaims
Posted in élucubrations, journal de bord on 22 novembre 2022| 2 Comments »
Rien ne va de soi, mais tu t’efforces /
tu oublie pour nous les parois des mines /
le dû des limaces, la convoitise sans tain /
le regard qu’attend l’oeil tressé, le vin qui tache /
les pluies dans la campagne, le sommeil lentement abjuré /
la planète accroupie, les masques à gaz, le creux au ventre /
le couteau à ta portée, intime /
ce qui crisse et remue où tu n’est plus /
ce que tu défendis, qui sera démoli,
mais vit encore dans la grande lumière
(2022)
JOURNAL D’UN AFFRANCHI (CCCCCCCIX): Le nyctalope
Posted in élucubrations, journal de bord on 20 novembre 2022| Leave a Comment »
Ils ne t’auront pas même si plus rien n’arrive.
Le livre des débuts, tu le connais par coeur: la poésie et ses beaux souliers, le scarabée qui peine à te reconnaître, les yeux endimanchés, les bordels où l’on bavarde, la déraison égrenant les noms de la Bête, les bougeoirs tordus dans la vase, la demeure qui fuit les lourds dimanches, la mer qui te boit, la voix carnivore qui divise et affole.
Tu n’es nulle part chez toi. L’hémorragie n’est qu’un acte manqué. Le rideau est enfin tiré. Qui te cache parle la langue des morts.
(2022)