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Archive for septembre 2018

Le destin est rarement sans merci, indifférent à peine, comme l’est l’aube qui sous son poids défaille – l’exorcisme qui s’entête – le tambour entravé – l’aveu souillé – la respiration qui nous mâche et s’en va – l’effroi au gré des miroirs – l’ocre et le brun – l’instant acéré des adieux, de leurs absurdes primeurs le vain spectacle – l’écho tendu vers la pitance et la cendre –  l’auberge brûlée que l’on appelle mémoire – les flancs lents du fleuve –  la griffe qu’on envie au fugace – le dur refuge et ses fidèles paresses – le puits où, effondrés, préservés, l’on nous jette – l’amulette qui nous signe, nous trahit et nous console.
Pourquoi ne pas boire alors, un doigt sur les lèvres, aux répits du monstre, aux nécrologies convenables, aux crabes de la dernière heure, à l’obscure lisière d’où viendra enfin la récompense?

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Rien ne manque à l’oracle, rien – sauf ce qui rôde et distingue.

Beckett disait: « bon qu’à ça », nous disons: « à quoi bon? »: comment savoir laquelle des deux sentences promet davantage?

Défoncer l’attente, on s’y est mis avec hargne, nous en éloignant pour ne pas nous survivre. Il fallait, plus tôt qu’à leur tour, en passer par là pour qu’à l’heure des adieux et des métamorphoses, nos vies se vengent enfin de l’époque – sachant pourtant qu’il n’y a, au bout de tous comptes, ni épreuve fortuite, ni solitude périssable, ni ordre qui sache nous exaucer…

Qu’en sera-t-il du témoin qui reçoit et ne prend pas, de l’étendue bricolée, du tracé celé à nos regards, de l’instant imprécis qu’on dissimule aux assassins?

Écrire, c’est s’exclure de soi, exact et absolu contraire de toute forme d’exhibition – meilleure manière, elle, de s’y complaire.

Ce n’est qu’à nos dépens qu’on sait berner l’imprévoyance.

Que faire si d’un coup tout est si loin, une autre fois, plus tard: les lacunes, les semailles, les soirs impairs, les choses qu’on appelle au secours, les détours qu’on garde, les mutilations précoces, les dégels qui s’empilent, l’araignée obstinée et la haine des possibles qui exhaussent et amenuisent?

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Nous, on s’acharne, on ne dort pas,

on laisse à d’autres les gros outils,

les grues, les treuils, les forges,

le lieu vacant qu’on voudrait défoncer,

les vœux piétinés, la peste qui fait ses comptes,

l’horloge inouïe, l’arsenal pour rire,

l’arrière-goût du plomb et du cuivre,

les parvenus se goinfrant de louanges,

les colporteurs plumant la mémoire,

la parole sèche et mal payée

qui perce, anéantit la règle,

crève l’oeil des cachots,

le piètre bouillonnement des apparences.

Il ne nous reste qu’à gravir le rebours,

ce qui, trop bas, trop rond, ne déchiffre que lentement

la fièvre qu’on partage, la rancune qu’on ampute,

la méfiance des conjurés dans le ventre du monstre,

les pantins qu’on épie, les mutants et leurs théâtres.

Oui, tout arrive trop tard, plus rien ne tient debout,

les tortionnaires lavent leurs cerveaux à l’eau des heures,

s’abîment dans le bruit des cordes,

reprisent les haillons, déchirent les nécrologies.

Bientôt vous nous verrez disparaître

dans l’étendue trouée, le geste qui l’éparpille,

l’épidémie qui fait boire,

détraque les rites, écarte des chimères

la traversée qui nous sépare des pierres,

des lèvres, des coïncidences,

des jetées que nos feux abritent,

de l’écho parcourant ces couloirs

que déjoue le poids du désir qu’on expie,

par qui, ravagés, l’on jouit et l’on tombe.

(2018)

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Vous ne nous connaissez pas: peu de choses nous suffisent pour ne pas mourir.

Lorsqu’on se porte au devant de la minceur des temps, presque plus rien ne se passe, la cruauté elle-même se repose, seul le bruissement brassant nos jours raconte le prochain abîme, le savoir ficelant (malice? ennui?) tout ce qu’il touche: les atermoiements des heures qui nous encerclent et nous malmènent – l’esquif novice et l’eau des origines – le pain rangé dans la poussière insomniaque – le strict frôlement des cordages – l’oubli enjoué et le coursier déchu – des urubus aveugles le toucher gauche, la hâte frôleuse – la nuit qui s’égosille, riche d’usages et d’équivoques, de livres inhabités – pour finir, le lézard aux yeux lisses veillant l’enfant qui joue, et l’horreur de tout voisinage…

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